Ce matin, je me suis réveillé presque humain. Ma colonne vertébrale semble lasse de se la jouer les signatures à la Zorro.
K. et moi sommes allés déjeuner pour la troisième fois au restaurant "El Texano", une nourriture excellente et pas chère sur fond de têtes de taureaux empaillées. J'essayais de lui expliquer pourquoi j'aime bien retourner toujours au même endroit, même quand je visite une nouvelle ville. Le premier jour, normal. Le deuxième, ils nous ont mis sans prévenir la CNN en anglais et nous ont offert le café. Au troisième, on a parlé longtemps de notre voyage avec la patronne. Son soutient fut vraiment très chaleureux. Comme beaucoup de gens ici, elle est très heureuse que des occidentaux viennent visiter la Colombie sans craindre de découvrir un pays ravagé par la violence et la misère, mais bien plutôt la plus grande réserve de biodiversité du monde, une des meilleures cuisines, et un pays d'artistes et de sportifs amoureux de la nature dont la grandeur est partout présente.
Ensuite, nous parlâmes pendant plus d'une heure de la route que nous allions suivre, cartes à l'appui, en attendant l'arrivée du mécanicien. Nous regardâmes celui-ci arrégler nos vélos, pour en apprendre. Ceci fut fait. J'ai acheté une selle moins tappe-cul, et un short de cycliste en prévision des fortes chaleurs. Nous sortîmes faire un tour, et prîmes le métro-câble qui permet de survoler Medellín. C'est très beau. Medellín est vraiment très en avance du point de vue aménagement urbain (transports hors-du-commun, très agréables et nettement plus développés que le Transmilleno de Bogotá, toujours bondé, colleur de gerbe, et difficile à comprendre; nombreuses bibliothèques installées dans les quartiers les plus défavorisés, ...). Cela nous a occupé l'après-midi, de même que savourer une délicieuse salade de fruit colombienne, ou une glace à la cacahuète.Tout en haut, un parc naturel est en cours d'emménagement, qui devrait ouvrir en Avril. L'origine de toutes ces avancées? Deux maires se sont succédés, un peu moins corrompus que les autres. La corruption, des grands politiques aux petits fonctionnaires, est un vrai problème ici. Les débuts de chantiers se multiplient et ne terminent jamais, bien qu'on les arrose copieusement d'argent public. Au nord de Bogotá, il y a une route qui reçoit ainsi des milliards de pesos chaque année depuis douze ans pour sa reconstruction à cause d'un glissement de terrain. Les riverains continuent d'aller vendre leurs légumes à dos d'âne le long de sentiers de terre battue. Rien n'a été fait. La Colombie est le pays d'Amérique où l'on paie le plus d'impôts, et où il y a le moins d'infrastructures publiques. Allez comprendre...

Au retour, douche et préparation minutieuse du bagage pour le nouveau départ. Ensuite, nous sommes allés boire un coup avec Chucho au Viejo Tinajón. 21h, dodo, après avoir laissé un petit mot dans leur livre d'or.

P.S: Certains peuvent s'étonner de me voir déjà prêt à repartir. Je m'en explique. La raison principale est que je vais nettement mieux. Je ne suis pas bête: si j'avais le moindre doute sur mon état de santé, je rentrerais immédiatement à Bogotá ou en France pour me soigner. Mais après avoir passé trois jours au lit à scruter mon mal, je commence à en comprendre la nature, et devine qu'il ne lui est pas incompatible de remonter sur un vélo.
L'autre raison, mineure mais néanmoins intéressante, est que tout le monde jusqu'ici nous a traité de fous en voyant nos vélos, nos cartes et nos bagages. Mais tous nous ont aussi dit que s'ils n'avaient pas un travail et une famille, ils partiraient avec nous. So, are we lucky? L'étincelle ne donne rien sur un tronc humide. Il lui faut de la brindille, de la légère et de la sèche.

FIN DE LA PREMIÈRE PARTIE

(DISTANCE PARCOURUE À VÉLO : 440 KMS)

Album photo de cette première partie du voyage

LEXIQUE:

arreglar : arranger, régler, réparer

Première (et unique) ballade à Medellín

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