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Voyage d'éléphants
27 septembre 2010

El viajero feliz 4/5

27/09/10   Au réveil, la señora avait arrangé notre brouet avec du cilantro, de l'ail et des oignons doux. Un délice. Elle nous servit par ailleurs le tinto, et de l'aguapanela con leche, ainsi que quelques petits pains. Nous remerciâmes chaleureusement ce couple qui avait connu bien des malheurs (y como le engañaron a mi marido porque tenían que comprarse una mula juntos, pero él no firmo ningunos papeles, y luego como nos robo el estado privandonos de nuestro negocio... en fin... la plata no lo es todo en la vida... Y volvimos a empezar con nada. Todo esto que ven ustedes lo conseguimos nosotros. Y un ultimo consejo: no tener familia numerosa. En nuestra época no sirven, ni se pueden criar).
J'allais oublier un détail intéressant: "Alerta Bogotá", la radio que l'homme alluma dès sept heures du matin. Une vraie pourriture médiatique. Une interview de la mère d'un soldat de dix-neuf ans qui avait été tué la veille par des délinquants au cours d'une fête entre jeunes (Y como lo ultimaron a su hijo?), un peu de numérologie, et surtout une émission sordide: "Estas pillado". Le concept est le suivant: la police communique à la chaîne en temps réel les arrestations meurtrière sur la route (et les plus scandaleuses). Un homme les énumère avec force détails gore (p. ex: un hombre conduciendo un autobus bajo drogas atropello a dos niñas en la salida de la escuela!) et l'animateur principal ("la voz de Bogotá") s'écrie à chaque fois "Qué beeestia!" suivi d'un jingle en forme de hennissement, et un petit air de salsa dont le refrain dit: "'Tas pillao".
  Dans cette radio, on passait également ce matin-là de façon récurrente une petite publicité pour des flacons de oméga 3 pour lutter contre le cholestérol (entrecoupé d'interviews de veuves par infarctus interposés), ainsi que les cris de l'animateur entre deux faits divers glauques scandés à toute allure: "Llevanten la cabeza!", "Llevanten el oido!". Histoire de maintenir le public attentif. 
   Nous nous mîmes en route. Quand je reviendrai de la vallée, j'aurai le cul tout dur. J'aurai mal dormi aussi, à cause du zonzon. Car le moustique est comme le desktop: il agit la nuit.
   Nous subîmes, nous subîmes. Nous fîmes première pause longue au bout de dix kilomètres. J'avais tracé comme un porc devant les autres grâce aux feuilles de coca et aux morceaux de panela solide que la señora nous avait généreusement offerts (ses fils sont cyclistes, vous comprenez). J'avais aussi appliqué les conseils de ces vieux baroudeurs de Bogotá, et passé tout le poids de mon bagage à l'avant. Plus facile à pousser qu'à tirer. Cependant, sept km plus loin je faisais déjà moins le malin. Surtout parce qu'à midi, fort de mon succès, je m'étais empiffré d'un gros plat de patates, yucas et morcilla sous les airs navrés de mes camarades (après trois jours de ce régime: farines et viandes, vous comprendrez que l'on s'épargne en n'allant plus aux toilettes. Mais c'est meilleur pour le vélo.) (De quoi je me plains? J'aurais préféré, peut-être, que la viande à mouches du boucher me colle la méga-chiasse? Ou bien l'eau du torrent? Non, menos mal.)
Bref, résultat des courses: je contemplais avec écœurement tout ce que nous avions monté, le fond de la vallée comme on contemple le fond d'une cuvette, tout en tentant d'étirer mes membres insectoïdes (de la rigueur, de la chitine!) à côté de cette satanée gringa qui, elle, fait ça sans problème (et vas-y que je me plie en quatre). J'y voyais notamment, au fond de la vallée, un nuage s'y crever comme un œuf. De même que les cascades, la pluie paraît immobile quand on l'observe à des kilomètres. Nous continuâmes à subir jusqu'à parveindre à la crête de la cordillère, les joues tremblantes de fatigue. Aujourd'hui, au total, 22km de route et plus de 1200m de montée. Là, David nous abandonna pour cause officielle d'avarie du genou. Il arrêta un camion qui roulait à vide et chargea à l'arrière bicyclette et bagages (ceci me rappelle ce que j'ai vu ce jour et point ne veux oublier: un pick-up flambant neuf transportant à l'arrière trois superbes porcs d'abattoir. Il s'agissait manifestement de se rendre à quelque concours de beauté). Avec Laura K., nous nous doutions cependant bien qu'il préfèrait passer la nuit avec sa copine, vu qu'il n'avait plus de crédit et un sac de couchage ridiculement petit pour le froid qui règne à cette altitude. Nous restons donc seuls, car nous voulons camper, et dégotons une petite auberge qui accepte de nous accueillir derrière, dans un bois de pins. Nous montons les tentes et attendons dans ce petit paradis de campeur: à l'abri du vent, un matelas de mousses et d'aiguilles triple épaisseur, sous des arbres amènes. Mon cul. La pluie des tropiques finira bien par nous retrouver dans notre planque; et avec le froid andin supérieur, ce sera pas rigolo. Mais en attendant, il faut manger. Comme Laura K. s'est endormie de fatigue, j'y vais seul dans le noir. Le chien se jette vers moi en hurlant et bavant de rage, je dis son nom: "Escap", et il baisse les crocs et remue la queue. Sacrés clébards. Gentil chienchien.
Dans le jardin, je trouve toute la famille occupée à courser les lapins qui se sont échappés de leur clapier. Je les aide à pratiquer ce sport (le lapin, c'est un peu comme le mouflon de LSH, mais en plus petit), j'en avise un étendu sur un banc et lui saute dessus, brandis; on me regarde de travers: celui-là était mort d'un infarctus. Sacrés clébards.
Nous rentrons dans la chaumière. La señora me prépare un poisson et une salade avec des tomates, salades, fraises et fruits tropicaux inconnus mais coupés fins. Nous discutons un moment du voyage, d'une possible ballade le lendemain, aguapanelita et je retourne me coucher. Une famille vraiment charmante.
Je dors à peu près bien malgré le froid et l'humidité qui ne cesse de faire des flaques sous mes fesses. L'équipement polaire est bon, puisque je ne suis pas mort.

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