Dom Matías: montée et porcherie

DEUXIÈME PARTIE :  MEDELLÍN - CARTAGENA DE INDIAS

   4h00 debout. Ana s'est levée pour nous dire au revoir. Etirements, 5h00 top départ. Nous traversons Medellín et commençons à subir en direction de Dom Matías. Nous le passons, et faisons 16 kilomètres de plus que prévu. L'air de rien, comme ça, en deux phrases, nous avons vaincu une montée bien pire que toutes celles que nous avions rencontrées jusqu'à présent. Sortir de la cuvette de Medellín n'est pas de la tarte (d'ailleurs ce n'est pas fini), mais nous nous étions envolés ragaillardis de la maison d'Ana y Jésus, prêts à en découdre, et la leçon avait été bien apprise: nombreuses pauses d'étirement des jambes mais aussi du dos, des bras, des hanches, ...
   A midi toutefois, pendant la pause almuerzo, j'étais très pâle, je ne sais quel mal m'est passé. J'ai fait une sieste-transe d'une demi-heure à même le sol du petit restaurant où nous étions arrêtés, et tout allait mieux.
   Le soir, à proximité de Santa Rosa de los osos, les patrons d'une tienda-bar nous offrent leur porcherie come dortoir. C'est vraiment super: elle est très propre, protège des pluies sinon du froid, et il y a une grande bâche qui constitue un matelas de luxe pour des campeurs. Je me lave au seau, appelle Laura qui commence à languir de mon abscence, et me couche enrobé de toutes mes fringues. Nous discutons un peu avec K. dans le noir et je sens que nos relations s'améliorent. Elle apprécie mon franc-parler à l'heure d'exposer les problèmes. De plus, je crois que ma pugnacité face au sale coup joué par ma nuque l'impressionne: elle m'avoue avoir fermement cru que j'allais abandonner là. Moi aussi. Pourtant non: je suis à nouveau en train d'écrire dans le noir, en train de respirer un des airs les plus purs au monde après avoir soupé de lait cru de vache et d'almojabanas. La vie a une saveur merveilleuse, et je me sens transformé par mes premières aventures: plus fort et plus calme, moins impatient face au charme du monde dont je prends conscience peu à peu de plus en plus. Le sommeil me prend, le sourire aux lèvres, vers dix-neuf heures trente.

LEXIQUE:

almojabana : petit pain au fromage

almuerzo : déjeuner

subir : monter

tienda : boutique

Comments

[antoine]

Dom Matias... Si ça c'est pas du pur fait exprès ;) faut t'appeler le parrain maintenant ? Et désolé mais ta dernière phrase me rappelle ces quelques vers :
Oui la pointe, le mot !
Et je voudrais mourir, un soir, sous un ciel rose,
En faisant un bon mot, pour une belle cause !
Oh, frappé par la seule arme noble qui soit,
Et par un ennemi qu'on sait digne de soi,
Sur un gazon de gloire et loin d'un lit de fièvres,
Tomber la pointe au coeur en même temps qu'aux lèvres !