El viajero feliz 2/5

25/09/10  Nous partons à 6h00 du matin du parque de los periodistas. Sur le chemin, beaucoup de crapauds nous encouragent (la Colombie est leur bruyant royaume), les marchands de glace font hurler leurs sirènes, de repente une marchande d'arepas sur le bord de la route, au milieu de nulle part, de repente una escuela. Douze kilomètres de montée pure au dessus de la Guadalupe et du Monserate (3100 m) , ensuite 24km de descente au milieu des nuages. A cette hauteur, ceux-ci défilent à une allure colossale.
   L'eau qui sort de la montagne a un goût exquis: la probamos.
   Parada en "Aguadulce", pour cause de crevaison (David). Mon vélo fit beaucoup des siennes au début , mais maintenant il se calme. Nous attendons l'arrêt de la pluie dans un café pour repartir. Devant mes yeux un permanent rideau de vapeur: la sueur de mon front. Partout des fleurs et des plantes inconnues. L'indescriptible sensation de rouler au milieu d'un nuage. Pruebo una arepa muy buena (arepa de maiz pelado) y una "envuelta" (pâtisserie cuite dans une feuille de banane). Nous tentons de faire un détour à pied jusqu'à la Chorrera (la cascade la plus élevée de Colombie). Laissant les vélos à la garde d'une bonne famille, nous marchons deux heures, bien que les habitants nous affirment à chaque fois: "La chorrera? Queda como a una hora caminando." Il semblerait qu'aucun vraiment ne sache. Sur le chemin, un type aigri nous agresse à moitié verbalement pour que nous lui achetions des fromages dans un stand pourri (la "cuajada", fromages frais accompagnés de diverses confitures, que j'ai d'ailleurs goûtés chez une marchande au milieu de nulle part: c'est exquis). Nous finissons par tomber sur l'entrée d'un parc où l'on pourrait toucher les premières eaux (le gros de la cascade, lui, demeure désespérément loin à l'horizon), s'il n'y avait pas ce couple de cassos gras à lard pour réclamer 8000 pesos (que incluyen la entrada, y el derecho a caminar...)(1). Dépités, nous rebroussons chemins. Nous finissons par atteindre Choachi où nous nous installons dans un parc pour enfants après avoir pris un vent au couvent du coin (2). Nous mangeons una picada para tres, pero que parece de cuatro (patates, yuca, morcilla, carne de res), Laura K. nous apprend à étirer nos membres, et nous regagnons nos tentes. Une famille accepte de garder nos vélos dans sa boutique pour la nuit.

Nuit: Dérangés par des bandes de jeunes bourrés qui ont couru autour de nos tentes en hurlant "ha llegado la guerrilla!", et la pluie qui a tombé sans discontinuer jusqu'au matin. Je me suis levé un peu trempé.

(1) On peut toutefois exposer une autre version des faits: dans vingt ans je pourrai dire que j'ai connu la chorrera du temps où il n'y avait que deux stands devant l'entrée, les précurseurs de la folie touristique qui devrait s'emparer des habitants (cf. le très bon film uruguayen "Les toilettes du Pape" à ce sujet).

(2) les "religieux colombiens" sont les seuls, de tout le voyage, à nous avoir refusé l'hospitalité. Le couvent en question est un bâtiment ultra-chic au milieu d'un quartier pauvre, du genre secte néo-évangéliste qui empeste le fric. Un homme portant chaîne en or et chemise largement ouverte sur son torse nous explique, sans cesser de siroter son verre de Whisky-coca, qu'une retraite spirituelle y est organisée ce week-end et qu'ils attendent trois cent personnes. Ils n'ont donc pas la place de nous accueillir, même tout au fond de leur immense parc... Woodstock oblige... Nous repartons,le bruit de nos pieds lourds couvert par les rires émanant des plus belles mercedes benz de la région et les hurlement d'un microphone appelant à la générosité et la miséricorde.